Quelle est la couleur de l’économie ?

argent Jan 21, 2018

Que l'on soit consommateur, employé ou entrepreneur, nos faits et gestes concourent à une dynamique économique. La couleur de l'économie est une approche synthétique intéressante pour se positionner lors d'un achat ou d'une recherche d'emploi. Notre vie économique est bien sûr un camaïeu de ces nuances, mais l'avoir en tête peut nous guider.

L'économie noire.

A l'image de la couleur, l'économie noire, lugubre et insidieuse, produit ce qui détruit ou mar. On y retrouve par exemple la fabrication et la distribution d'armes (une affaire d'état), de cigarettes, de drogue, de pesticides, etc. .

Certes, « toutes les armes fabriquées n’ont pas tué » et « il faut bien se défendre ». On entend aussi « les fumeurs sont bien informés » et « les fabricants de cigarettes soutiennent des associations caritatives », etc… et c’est sans doute ainsi que l’économie noire est légitimée.

Au quotidien, nous ne sommes souvent pas conscients de cette facette de notre activité économique ni de notre rôle. L’économie noire offre de bons rendements et des capitaux importants y sont investis. A bien y regarder, vous y trouverez éventuellement vos avoirs de retraite, le compte épargne de votre fils cadet, le fonds de placement sur lequel vous faites fructifier vos économies pour les vacances, etc…

Repérer la couleur de l’économie que vous soutenez par vos investissements est une précaution importante.

L’économie rouge.

L’économie rouge est héritée du Fordisme. Elle puise dans les ressources naturelles qu’elle transforme selon un processus linéaire en déchets « grâce » à une ligne de fabrication et de distribution nocive pour l’environnement.

Lorsque Henri Ford a conçu cette manière rationnelle et sophistiquée du fabriquer des voitures, la population mondiale n’était constituée « que » de 1 milliard d’individus.
Les ressources naturelles étaient alors perçues comme illimitées et inépuisables. Il n’était pas conscient qu’il aurait une telle influence sur la couleur de l’économie. Aujourd’hui nous sommes 7 milliards. Ce qui était juste en 1800 pourrait n’est plus tenable aujourd’hui.

L’économie rouge «emprunte», tant à la nature qu’aux hommes (occasionnellement considérés comme une ressource parmi d’autres), sans jamais se soucier de rembourser ou de restaurer un jour. (le parallèle avec une transaction bancaire est intéressant). Ce faisant, elle «empreinte» et impacte la planète.

L’économie verte.

Lorsqu’il est question de vert au sujet de la couleur de l’économie, c’est le signal qu’il y a eu une prise de conscience mais cela ne suffit pas toujours. L’économie verte regroupe les produits labelisés « bio », « durable », « Fair Trade ». Pleine de bonne volonté, elle est néanmoins maladroite et parfois peu efficiente… Quand elle n’a pas carrément été détournée de sa finalité. A retenir :

  • Les labels portent sur des critères partiels : un concombre « bio » peut-être emballé dans un un film plastique non dégradable. Un chocolat « fair trade » paie correctement les agriculteurs… qu’il expose à de hautes doses d’engrais et de pesticides (qui a dit « Fair Trade » n’a pas dit « bio ») etc.
  • Ces labels se sont tellement multipliés que le consommateur y perd son latin. Certains labels encore largement valorisés sont devenus désuets et correspondent simplement au paiement d’une redevance.
  • L’économie verte a donné lieu au « Green washing » : sous couvert de label, on pratique une augmentation de prix pas toujours justifiée.

Occasionnellement, l’économie verte crée ses propres revers. L’exemple le plus connu est celui des produits ménagers dans lesquels on a substitué des composant végétaux (acides gras de l’huile de palme) aux produits de synthèse. L’industrie s’est rapidement approprié cette innovation. Elle l’a exploitée dans des proportions telles que la plantation intensive de palme africaine a conduit à la destruction des forêts primaires, habitat de l’orang-outang.

En bref, l’économie verte s’affiche comme étant consciente des enjeux. Mais quand on y regarde de plus près, c’est une jungle pas toujours recommandable. Elle exige de nouveaux investissements de la part des producteurs (particulièrement dans le domaine alimentaire). Ces derniers se reportent sur le prix final du produit et sur le budget du consommateur. Paradoxalement, il existe des produits irréprochables sans label.

L’économie rose.

Le rose serait la couleur de l’économie du coeur. Il illustre le mouvement de la décroissance, qui remplace l’abondance des biens matériels par le lien social et le partage.
Le mouvement de la décroissance est un retour aux sources de l’Economie. Il semble innovant mais des économistes tels que John Stuart Mill projetaient dès le 19ème siècle que nous reviendrions à un état stationnaire, sans croissance. Il ajoutait que cela nous permettrait de nous consacrer à l’amélioration de notre « art de vivre ».

L’Economie de la décroissance repose sur la simplicité volontaire. Avoir une vie conforme à ses valeurs, ce qui peut impliquer de renoncer à la voiture, la télévision et/ou au le téléphone portable, de choisir de travailler à temps partiel, etc.
Loin d’imposer le dénuement, on cherche davantage à inciter les personnes aisées à vivre plus simplement. S’y ajoutent des pistes telles que le revenu universel, la gratuité du bon usage, le ralentissement, la fin de la publicité.

Dans une société de consommation guidée par le  mythe du pouvoir, de la jeunesse éternelle et de l’humanité invincible, les valeurs de la décroissance peinent à faire leur place. L’économie rose est encore anecdotique. Elle suscite des résistances parce que le mot « décroissance » évoque un ascétisme matériel que beaucoup ne sont pas (encore) prêts à envisager.

L’économie bleue.

Le bleu ne figure pas encore officiellement dans le panel de couleur de l’économie réelle, c’est une perspective. Günter Pauli est le principal porte parole de cette approche qui allie biomimétisme, économie circulaire et souvent, haute technologie. L’économie bleue change de paradigme et à se titre, elle suscite du scepticisme. Elle ne vise pas à épargner ou à préserver les ressources naturelles, mais va au-delà et s’affirme en tant qu’actrice de leur régénération. L’économie bleue ne cherche pas à supprimer des emplois, mais au contraire à en créer. Enfin, elle ne prône pas l’austérité, mais démontre l’abondance.

Dans la nature, RIEN ne pollue. Chaque déchet est le substrat qui crée l’abondance d’une autre espèce. Il n’y a pas de gaspillage, tout est transformé en nutriment, en matière première ou en énergie pour être réutilisé. Il n’y a pas de rossignol au chômage ni de termite en burn-out. Dans son histoire, l’Homme s’est exclu du cycle naturel, a inventé des matières qui ne servaient qu’à lui seul. Ce faisant, il  s’est imposé des rythmes qui ne lui conviennent vraisemblablement pas.

Détruisant la nature dans chacun de ses gestes quotidiens, l’Homme ne semble plus en être conscient ni capable de s’aménager le temps de prendre le recul nécessaire pour reconsidérer la situation.

Pourtant, la nature est puissante. Imaginez que nous travaillions avec elle, que nous lui donnions les moyens de se restaurer. L’économie bleue postule que toute activité économique devrait s’intégrer dans son écosystème et permettre le maintien de ses règles évolutives.

Un exemple ?
Lorsque vous buvez votre expresso chaque matin, savez-vous que seulement 0,2 % de la plante est utilisée? Le reste est brûlé. En Colombie, une expérience pilote a proposé de réutiliser ces déchets comme substrat pour la culture de champignons Shiitake. Ces champignons ont permis de nourrir la population, de générer des emplois et des revenus par la vente des excédents. Les souches des pieds de champignons ont été utilisées pour nourrir des cochons (viande et revenus). Les excréments desdits cochons ont été utilisés pour produire du biogaz (autonomie énergétique). Ce business-model a été reproduit près de 300 fois dans le monde entre 1996 et 2013.
Il génère autonomie alimentaire, revenus et emplois. Tous ces substrats sont biodégradables. Et là, tout à coup, votre café a meilleur goût.

L'Homme peut retrouver sa place dans le cycle naturel. Pour cela il faut concevoir des modèles d'affaires circulaires, à l'image des écosystèmes. Chaque entrepreneur devrait, dès la conception de son activité, adopter sa créativité entrepreneuriale au biomimétisme. Puis à chacun de nous de considérer un à un nos déchets, de les substituer ou de les valoriser.

Dans une telle perspective, créez des emplois et générez des revenus en faisant partie d'un cercle vertueux de régénération des ressources. A chacun d'entre nous de choisir la proportion de noir, de rouge, de vert, de bleu ou de rose dans notre vie professionnelle, personnelle et économique.

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